Un Méens à Santo Domingo

Journal

Octobre 1998


Jeudi 1° octobre

Le travail reprends lui aussi petit à petit son cours normal, mais la charge supplémentaire imputable au cyclone reste la même. D'autant plus que les secours et aides en provenance de France s'intensifient sérieusement : envoi de médecins, de volontaires, de matériel, de médicaments... Des jeunes français ont organisé sur place une collecte de vêtements, nourriture, matériel, argent, etc. ; pour venir en aide aux habitants de l'île de Saona, dont le village a été complètement détruit. Nous devons y aller ce week-end pour leur amener tout cela, j'espère que tout se passera bien.
Ce soir Cira et Patricia viennent manger à l'appartement, au menu : lasagnes et choux à la crème.

" Si la destinée ne nous aide pas, nous l'aiderons nous-mêmes à se réaliser. " (Chosroès Ier, le Grand, roi de Perse)

Vendredi 2

La propriétaire n'est vraiment pas pressée de venir voir les dégâts qu'a subit son appartement, j'ai l'impression qu'elle va bientôt perdre ses locataires.
Les pompiers apprennent à des Dominicains à se servir de leurs tronçonneuses. C'est comique à voir. Je répugne à le dire, mes ces gens là, de la rue, ont quelque chose de primitif dans leur comportement . Est-ce seulement une impression due à la différence de culture ? Un manque d'éducation ?
Ce soir, réception à la résidence de l'ambassadeur pour accueillir l'arrivée de la mission de policiers qui vont assurer une formation auprès des autorités locales.

" Quelle est la première partie de la politique ? L'éducation. La seconde? L'éducation. Et la troisième ? L'éducation. " (Jules Michelet)

Samedi 3

Nous partons en ce début d'après midi en direction de Cumayasa, d'où nous prendrons le bateau pour l'île Saona. Il nous faut bien deux heures de route (et de chemin épuisant) pour arriver au petit village de Cumayasa où sont ancrés de nombreux bateau de plaisance. Là, un français tiens une petite boite du nom de "Cumayasa yacht service " où il propose des excursions, notamment à bord du Spider, un grand catamaran à moteur qui ressemble à une araignée.
Avant de nous mettre à table puis au lit, nous déchargeons les 4*4 (nous sommes une bonne quinzaine de français) sur le quai.

" Pour ceux qui ont l'austérité trop facile, le devoir peut être dans le plaisir. " (Jean Rostand)

Dimanche 4

Je ne me rappelle pas avoir déjà passé une nuit aussi abominable que celle-là... Déjà pendant le repas, nous avions subi les attaques d'armées de moustiques, mais bon, à part qu'ils piquaient aussi à travers les vêtements, j'avais déjà vu ça. Nous dormions tous dans une grande pièce ouverte aux courants d'air (heureusement vu la chaleur) et aux moustiques (pour notre malheur). Il a fallu que je choisisse entre dormir et me faire dévorer où rester éveillé et me faire piquer. J'ai finalement choisi la première solution, mais un peu tard puisque nous nous sommes levés à 6H30, avec le soleil, fourbus et criblés de piqûres. Entre temps, nous avons eu droit à un cauchemar d'un camarade dont je tairais pudiquement le nom. Il s'est redressé sur son matelas en plein milieu de la nuit et a crié " Attention ! Attention ! Des lapins ! Des lapins ! Attention ! " Alors quelqu'un lui dit " mais non F.. tu dors !" " Non je ne dors pas, Des lapins ! Des lapins ! ... Ah bon, peut-être que je dors... " et il est retombé comme une masse.
Après cette nuit agitée, s'il en est, nous commençons la journée par un bon petit déjeuné, puis nous chargeons le bateau : eau potable, lait, vêtements, conserves, riz, et surtout 260 plaques de tôle ondulée.
Nous attendons les retardataires, dont un américain qui n'a pas levé le petit doigt, ni ouvert la bouche durant toute la journée.
Enfin, nous levons l'ancre vers 11 heures, puis la jetons deux heures plus tard au large du village de San Manjuan, unique petit village de pêcheurs de l'île de Saona qui comporte une centaine de familles. Un autre bateau est ancré là, un petit bâtiment de la marine de guerre dominicaine qui évacue quelques personnes.
Après quelques échanges radios, des Lanchas viennent accoster notre Spider, pour y transborder notre chargement. Lorsque je débarque moi-même sur l'île, le matériel a déjà été acheminé sous une tente militaire sur des palmes de cocotiers. Le village doit être tout rassemblé autour de la tente, mais s'organise rapidement sous les ordres d'un militaire affable. Ces gens là sont d'une grande discipline et très respectueux de nous-mêmes et de l'aide que nous leur apportons. Néanmoins, ils ne semblent pas affectés outre mesure par le passage du cyclone ; et des aides antérieures leur ont permis de surmonter les premières difficultés.
Un responsable local appelle tout le monde famille par famille, et en moins de deux heures, il ne nous reste plus que quelques grains de riz éparpillés dans le sable.
Déjà il nous faut partir car nous devons être rentrés avant la nuit et nous ne pouvons pas même profiter de la plage intacte qui s'offre à nous.

C'est avec un plaisir non dissimulé, que, cinq heures plus tard, je me suis couché, hors de portée des moustiques, et la tête pleine des images de ces enfants souriants.

" On ne doit pas accorder sa confiance à quelqu'un qui ne sourit jamais. " (Henry Million de Montherlant)
 

Lundi 5

Deux jeunes stagiaires sont arrivées aujourd'hui de Martinique pour travailler au Bureau de Coopération Linguistique (BCLE). Elles sont tout à fait sympathiques.
Ce soir nous mangeons avec Guy et Eric au Don Pincho. Juste à coté, sur la 27 de février, les pelles mécaniques travaillent toute la nuit pour finir les tunnels.

"Sois fidèle à ton impression première. " (Sidonie Colette)

Mardi 6

Aujourd'hui, Eric part en hélicoptère Puma du coté de Barahona, pour aider à la coordination des secours, je l'envie à peine...
La circulation est vraiment de pire en pire ici depuis que les policiers remplacent les feux rouges. On pourrait croire que ce sont des humains, et donc disposant d'un sens pratique plus efficace dans cette situation que la machine, mais non ! pas dans ce cas particulier.

"Savez-vous pourquoi je fais encore quelque cas des hommes? C'est que je les crois sérieusement des machines. " (Julien Offroy de La Mettrie)

Mercredi 7

Ce soir, Monsieur l'ambassadeur réuni les Français qui souhaitent parler de leurs problèmes après le cyclone ou qui ont des initiatives à proposer pour venir en aide à la population locale. Je trouve que le débat est assez élevé, comparativement à ce que l'on pourrait entendre généralement en France pendant ce type de réunion... Bien évidemment, les dérives égoïstes sont toujours présentes.
Il ressort de ce débat que beaucoup d'entreprises Françaises sont prêtes à s'investir dans le projet, qui par des dons, des prêts de camions, d'entrepôts. Bref un comité de coordination est créé, il est vraisemblable que cela puisse aboutir à quelque chose de vraiment efficace.
Certains intervenants critiquent la volonté du gouvernement Dominicain de minimiser le nombre victimes, et estiment que plusieurs milliers de personnes ont trouvé la mort ont à cause des inondations. Certains récits poignant mettent la salle en émoi.

"Nos émotions sont dans nos mots comme des oiseaux empaillés. " (Henry de Montherlant)

Jeudi 8

Ce soir, je suis invité à manger chez Bénédicte et Valérie. Leur voisin Tchiu-tchiu est aussi là: c'est un dentiste taïwanais, un drôle de personnage. Il travaille quatre mois à Taiwan, met de l'argent de côté, puis vient quatre mois à Saint Domingue. Là, un collègue à lui mets à sa disposition son cabinet et voisin Tchiu-tchiu s'en va de part les rues de Saint Domingue à la recherche de patients. Il leur fait ouvrir la bouche, leur paye le taxi et les soigne gratuitement. Son rêve est de devenir prêtre dans les Pyrénées basques...

" L'Occident regarde la mer et l'Orient regarde la montagne. " (Paul Claudel)

Vendredi 9

A midi, il me tombe quatre tonnes de fret sur les bras, sans prévenir, ça fait lourd ! En plus, les civils qui étaient là ne voulaient pas décharger les cartons, il faut dire qu'il y en avait prés de quinze tonnes. Bref il a fallu faire venir des militaires, payer les civils, et finalement, la dernière caisse d'eau passe la porte vers 19 heures, OUF !
Dodo.

" Au théâtre les spectateurs veulent être surpris. Mais avec ce qu'ils attendent. " (Tristan Bernard)

Samedi 10

Véronique part à Barahona pour visiter son aéroport, mais là-bas, tout est détruit, et nous ne savons même pas si nous trouverons quelque chose pour dormir. Bref, je préfère partir avec Valérie et Bénédicte au dessus de San Cristobal, histoire de prendre un peu le frais.
Malheureusement, cette région là a été elle aussi durement touchée par le cyclone. La plupart des forêts qui nous entourent me font penser à une image que j'avais vu de ce qui restait des arbres juste au dessous de l'explosion aérienne d'une bombe nucléaire : il ne reste que les troncs, debout, sans aucune branche ni feuille. La différence réside en le sous bois, qui lui, n'a pas souffert.
Nous nous arrêtons, lorsque ma vaillante 205 n'en peut déjà plus de creux et de bosses, au fond d'une petite vallée. Il y a là quelques maisons au bord de la route et des hommes en train de tirer du sable du lit du torrent pour le charger dans un camion, sous la surveillance d'un militaire armé.
Nous prenons un petit sentier qui remonte le long du torrent, mais bien vite, nous devons nous arrêter, car le chemin a été emport et nous ne comptons même plus les troncs d'arbre tombés en travers du ravin. l'eau est fraîche, et nous ne profitons pour y rafraîchir nos pieds même pas fatigués par des heures de marche forcée.
Un paysan vient entamer la discussion à coté de ce qui reste de sa maison, il nous explique que la tout autour où nous ne voyons que le lit du torrent, il y avait un jardin de bananes et d'agrumes, et que tout avait été emporté. Sa maison, la seule qui était restée en place, n'est de ce fait plus intéressante pour lui. Il est cependant plus chanceux que la cinquantaine de personnes qui s'étaient réfugiés dans l'école du village dont on n'a rien retrouvé, pas plus les planches que les villageois.

" Le soleil ne s'est pas encore couché pour la dernière fois. " (Tite-Live)

Dimanche 11

Que c'est bon de dormir ! Nous devions trier des  vêtements pour l'île Saona, mais c'est reporté à mercredi.
Au fait, j'oubliais, notre vitre et son cadre ont finalement été changés cette semaine. Pas trop tôt...
Il fait une chaleur épouvantable ces derniers jours, et surtout ces dernières nuits...

" On ne doit que la vérité aux absents. " (Emile Augier)

Lundi 12

La ronde des associations humanitaire commence pour venir récupérer le matériel qui a été entreposé ici, à la maison de France. Malheureusement, rien n'est clairement identifié : aucune indication de provenance ni de destinataire, l'inventaire est fait à la va-vite, en estimant - à l'œil- le poids des cartons de riz...
A midi, le " Ventôse " et le " Francis Garnier ", deux bâtiments de la marine française amarrent au port de Saint Domingue. Ils reviennent de mission de Barahona avec Eric à bord et 30 tonnes de fret de rab. Il s'agit plus en l'occurrence d'une mission médiatique, avec une quinzaine de journalistes, mais bon, où s'arrête l'un, où commence l'autre ?
Je retrouve à bord un camarade de promotion que je ne me souvient pourtant pas avoir vu à Paris. Il finit son service long dans trois jours, et va visiblement faire un mois de cure de sommeil.
Ce soir, Dîner- buffet à la résidence en l'honneur de nos glorieux sauveteurs ; je m'en mets plein la panse.

" Je regarde comme un des bonheurs de ma vie de ne pas écrire dans les journaux. Il en coûte à ma bourse - mais ma conscience s'en trouve bien. " (Gustave Flaubert)

Mardi 13

Ce rôle d'épicier commence à me courir sérieusement, et j'ai hâte que le stock se soit définitivement épuisé. En plus, des cartons de lait se sont éventrés, et ça commence à sentir bon là-dedans...
A midi, je vais manger une pizza sur l'herbe de la place d'Espagne.

" C'était un tout petit épicier de Montrouge Et sa boutique sombre, aux volets peints en rouge, Exhalait une odeur fade sur le trottoir. " (François Coppée)

Mercredi 14

Le stock est enfin pratiquement écoulé. Pour me faire plaisir, le premier conseiller m'apprends que 40 tonnes vont encore arriver la semaine prochaine, je suis rââââvi.
En plus, je m'aperçois que j'avais oublié mon portefeuille sur l'herbe hier midi... Moi qui n'oublie jamais rien d'habitude (), ça m'affecte profondément. D'autant plus qu'il y avait ma carte bleue à l'intérieur... A ce propos j'en reparlerais demain.
Ce soir nous trions enfin grossièrement les vêtements à destination de l'île Saona. C'est sans doute la chose dont ils ont le moins besoin mais bon, on nous l'a donné, on ne peut pas le garder pour nous ou le jeter...  on trouve vraiment de tout, depuis le jean complètement pourri jusqu'au vêtement tout neuf. Curieusement, il y a 70% de vêtements pour femmes, 20 pour enfants et 10 pour hommes. De deux choses l'une : Soit elles sont plus généreuses, soit elles ont beaucoup trop d'habits...

" L'argent, c'est comme les femmes: pour le garder, il faut s'en occuper un peu ou alors... il va faire le bonheur de quelqu'un d'autre. " (Edouard Bourdet)

Jeudi 15

Enfin une journée presque tranquille. J'en profite pour faire une parenthèse sur les escroqueries sur les cartes bleues internationales. La moitié des Français que je connais ici et qui s'en sont servi, ont eu des débits frauduleux. Nous avons reçu dernièrement une lettre d'un jeune couple qui après être rentré de voyage de noce, s'était vu retirer en République Dominicaine prés de 25.000 francs sur leur carte...

" On ment plus qu'il ne faut par manque de fantaisie: la vérité aussi s'invente. " (Antonio Machado)

Vendredi 16

Ce soir Valérie et Bénédicte mangent à la maison, au menu : tartes (pas les filles, les plats).

« S'il faut savoir avoir raison sans choquer, il faut aussi savoir se tromper sans commettre d'erreur. » (Robert Mallet)

Samedi 17

Ce matin tôt, Eric et Guy sont partis avec tous les autres en direction de l’île Saona. Je reste ici bien au calme. Le seul souvenir de la nuit que j’avais passé là-bas, suffit à me persuader que j’ai bien fait. Et puis cette île commence à me sortir par les oreilles. Je dois néanmoins reconnaître que c’est le meilleur rapport qualité/ distance.
J’en profite pour lire tranquillement, jouer de la trompette en prévision de ma séance de Jazz lundi avec Philippe, et je vais courir quelques kilomètres au parc, et dormir...
Elisa et Véronique viennent manger à la maison ce soir.

« Le repos? le repos, trésor si précieux Qu'on en faisait jadis le partage des dieux! » (Jean de la Fontaine)

Dimanche 18

Je finis mon livre « Eva Luna » de Isabel Alende.
Cet après midi, nous allons chez Véronique avec Elisa pour leur apprendre à faire du pain.

« Vente, gresle, gelle, j'ay mon pain cuit. » (François Villon)

Lundi 19

C’est l’anniversaire de Valérie ce soir, nous faisons un petit repas sympa à la maison, puis tout le monde va se coucher car le week-end n’a visiblement pas été reposant pour tout le monde... Il n’y a qu’à voir la face d’Eric-le-balafré, qui s’est pris un arbre en faisant du « skurf » (sorte de ski surf nautique). Les soirées ont elles aussi été animées à les entendre, j’ai hâte de voir les photos.

« Si tous les hommes étaient parfaitement contents, il n'y aurait plus d'activité dans le monde. » (Hollback)

Mardi 20

Je me demande comment je fais pour garder mon calme dans les embouteillages... Il faut dire qu’ils se mettent dans des situations tellement ridicules, que c’en est plus risible qu’autre chose ! J’ai proposé une coopération en matière de circulation routière, on m’a répondu qu’on ne pouvait pas empêcher les gendarmes de se mettre à l’abri quand il pleut, surtout lorsqu’ils sont payés 2000 pesos par mois.

« Il est doux, il est beau de mourir pour sa patrie. » (Horace)

Mercredi 21

J’ai oublié de parler de ma séance de Jazz lundi. Ca s’est plutôt bien passé, mais il y a du pain sur la planche. Il va juste falloir que je travaille la transposition et l’oreille qui me fait tellement défaut... C’est une bonne chose, ça me motive pour travailler un peu plus.

« La musique, c'est du bruit qui pense. » (Victor Hugo)

Jeudi 22

Ma voiture cale sans arrêts depuis quelques jours, et je me décide ce matin à l’amener au garage. Avant d’arriver, j’ai eu le temps de bénir dix fois le ciel de m’avoir fait trouver un appartement prés de la maison de France, pour ne pas avoir à traverser les embouteillages tous les matins... Arrivé là-bas, je suis pris en charge par un commercial qui prends mes desiderata, puis il me présente le mécanicien qui va officier sur ma voiture... Impressionnant d’organisation tout cela (Si votre ramage se rapporte à votre plumage...). Pour le retour à la maison de rance, le taxi met presque moitié moins de temps que moi, en voilà un efficace pour une fois.

« Que chacun s'exerce dans l'art qu'il connaît. » (Cicéron)

Vendredi 23

Ce soir, le grand Eric Lesage nous fait les honneurs de la « Casa de Bastidas » dans un récital de piano époustouflant ! Il est vraiment plein de vitalité et ne laisse pas même le temps au public de l’applaudir.

« Nous voyons (... que les passions) sont toutes bonnes de leur nature, et que nous n'avons rien à éviter que leurs mauvais usages ou leurs excès. » (Descartes)

Samedi 24

Nous partons après de multiples attentes (20 minutes par dix personnes = 3 heures...) en (début ?) d’après midi vers Bayahibe pour une (encore !) plongée au large de l’île Catalinita. Une petite pause au Neptuno, histoire de vérifier que les langoustes sont toujours aussi bonnes, puis nous faisons un crochet vers « Altos de Chavon ». C’est l’œuvre d’un riche illuminé Italien qui a recréé de toutes pièces un village italien , avec se maisons, ses commerces, son église, et surtout un théâtre antique monumental ! Malgré la nuit qui est déjà tombée, le site est fantastique, un peu fantasmagorique à vrai dire. Ce n’est pas un décor de cinéma, puisque tout est en pierre (importée ? ). Il faudrait voir cela en plein jour, car sans animation, c’est plutôt lugubre...
Bien en tendu, tous les restaurants sont fermés à Bayahibe lorsque nous arrivons vers 21H30. D’autant plus que les touristes ne sont toujours pas vraiment revenus depuis le cyclone. Nous nous rabattons donc tels des affamés sur le marchand de Hot-dogs ambulant « Super Chimi » !

«Comment ne pas avoir peur devant cette absence de raison dénuée de toute folie? » (Raymond Queneau)

Dimanche 25

Cet Eric Lesage est vraiment un bon vivant, ça fait plaisir de voir que des sommités mondiales peuvent s’éclater avec des pauvres CSN paumés au bout du monde. La plongée est particulièrement intéressante aujourd’hui, et nous mangeons force lambis et oursins à peine sortis de l’eau.

«La variété est la source de tous nos plaisirs, et le plaisir cesse de l'être quand il devient habitude. » (Evariste Désiré de Parny)

Lundi 26

Même trafic que la dernière fois pour aller chercher ma voiture. Le commercial a l’air si sûr que la voiture marche à la perfection, que je mets les ratés sur le compte du froid qui règne ici... Mais non, arrivé à la maison de France, la voiture marche toujours aussi mal, et j’ai mal aux 200 pesos que j’ai laissé à monsieur Peugeot.

« La barque de Caron va toujours aux enfers. Il n'y a pas de nautonier du bonheur. » (Gaston Bachelard)

Mardi 27

Depuis quelques jours, après une semaine de canicule ( !), il fait plus frais ( !) la nuit. Si ca continue comme ça, il va falloir prévoir les couvertures... A vrai dire, je n’y croit guère, même si les Dominicains disent qu’ils mettent un col roulé en hiver...

« Je n'écris plus une phrase affirmative sans être tenté d'y ajouter: «peut-être» » (André Gide)

Mercredi 28

Ce soir, je suis invité au théâtre national par le proviseur du lycée français pour un concert de l’orchestre symphonique national. Le programme commence par une symphonie d’un auteur classique dont j’ai oublié jusqu’au nom. Suit un des concertos pour piano de Grieg... J’estime que lorsqu’un soliste ne maîtrise pas une partition, fusse t elle très dure, il n’a aucune raison de l’interpréter en public. Le programme se termine par une fantastique symphonie (pas le contraire) qui me réconcilie tout à fait avec l’orchestre, ce fut, à n’en point douter, du grand art.

« Si seulement on pouvait être tout à fait pour, ou tout à fait contre! » (Simone de Beauvoir)

Jeudi 29

L’état de ma voiture ne s’étant pas arrangé, je me décide à téléphoner au garage pour leur dire ce que je pense de leurs compétences. On me réponds le plus naturellement du monde qu’ils avaient fait ce que je leur avais demandé : vérifier la carburation, et que si il y avait quelque chose d’autre qui n’allait pas, ça ne les regardait pas !

« Que le soleil ne se couche pas sur votre colère. » (Epîtres)

Vendredi 30

Ce soir, Bénédicte nous fais des crêpes, c(est bien comme cela que je conçois la vie de coopérant, avec des stagiaires sous ses ordres. D’autant plus que les crêpes ne sont pas mauvaises... Nous ne nous couchons pas tard, car demain, nous avons prévu de partir tôt (Ah ! la bonne blague !) pour aller jusqu’à « Las Galeras » sur la presqu’île de Samana. Plus loin, ça n’existe pas sur l’île.

« Les illusions tombent l'une après l'autre, comme les écorces d'un fruit, et le fruit, c'est l'expérience. Sa saveur est amère. » (Gérard de nerval)

Samedi 31

Je suis prêt à 7H15 (Bâillement) mais ne mous partirons pas avant 9H30 (Soupir). La route est très bonne, même après l’autoroute. Une fois arrivé sur la côte nord de l’île, nous nous arrêtons prés d’une maison en bois qui sert de poissonnerie. Là, le poissonnier nous dit que ça fait trois jours qu’il pleut (chouette !) et que les pêcheurs n’ont pas pu sortir... Heureusement, quelques minutes après, Pancho arrive sur son Moto-concho, avec un seau de poissons. Il n’y en a pas beaucoup, mais ils sortent juste du filet. Nous prenons donc un bel « Urey » (sorte de dorade) de trois kilos. J’en salive déjà, vu le peu de poisson que nous avons le loisir de manger à la capitale. Le reste du trajet nous amène à travers une féerique forêt de cocotiers vers la plage de las Galeras. Après un petit en-cas, nous nous jetons à l’eau, avec nos masques pour admirer des fonds qui pour tout dire commence à me lasser sérieusement. Mais bon, le cadre est beau, et la nourriture divine. Je dis ça à propos du poisson que nous avons englouti ce soir. Grillé au charbon avec du jus de citron et de l’huile d’olive...

« J'aime les paysans, ils ne sont pas assez savants pour raisonner de travers. » (Charles Montesquieu)
 
 

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Mise à jour le 31 octobre 1998